Kaguya-hime, la princesse lumineuse — Contes de fée méconnus

Un vieux couple sans descendants s’affairait à couper du bamboo tous les jours afin d’être en mesure de subsister. Un jour, le vieil homme trouva quelque chose d’unique : une lueur comme il n’en avait jamais vue émanait du tronc de bamboo qu’il venait de couper. En s’approchant davantage, il remarqua qu’un petit être se trouvait à l’origine de la lueur. Doucement, il prit l’être gros comme son pouce dans sa main et l’apporta à sa femme.

— C’est une toute petite fille, s’exclama la dame âgée.

— Appelons-la Kaguya-hime, la princesse lumineuse, dit le vieil homme.

Ainsi, le couple adopta la petite fille trouvée dans le tronc d’un bamboo et l’éleva avec affection jusqu’à l’âge adulte. La princesse Kaguya, même si ses parents tentaient de garder son existence discrête, attirait toujours les regards de par sa beauté inégalable.

Alors que la ravissante jeune femme aidait son père à couper les bamboos, ils trouvèrent ensemble des pépites d’or dans un tronc. Père et fille les ramenèrent à la maison avec excitation.

— Ces pépites nous seront fort utiles, dit la mère de Kaguya-hime, sachant qu’elle et son mari n’avaient plus les mêmes capacités physiques qu’autrefois pour couper le bamboo.

La petite famille put donc profiter de leur quotidien le cœur plus léger. Cela dit, la quiétude fut de courte durée. Lorsque la rumeur d’une jeune beauté dont la famille s’était nouvellement enrichie parcourut les terres aux alentours, de nombreux prétendants se présentèrent à la porte de la maisonnée pour demander la main de Kaguya-hime en mariage.

De ceux que le vieil homme ne réussit pas à faire fuir se trouvaient cinq jeunes hommes avides de la jeune fille. Afin de s’en débarrasser, la princesse lumineuse leur fit un marché. Quiconque lui ramènerait un objet convoité aurait sa main. Elle n’aurait qu’à leur assigner des tâches irréalisables et s’assurerait ainsi que les hommes ne puissent jamais les réussir.

Au premier jeune homme, elle demanda de lui ramener un bol en pierres utilisé par Bouddha pour mendier. Elle savait que ce bol se trouvait en Inde et ne pourrait donc point être récupéré facilement. Lorsque le prétendant lui ramena une coupe après quelques jours, elle sut immédiatement que ce n’était pas la bonne. En fait, le jeune homme avait fait ramener une vieille coupe en pierre d’un temple aux environs de Kyoto. La princesse Kaguya remarqua dès le premier coup d’œil que la coupe ne pouvait être celle demandée, puisqu’elle ne brillait pas.

Au deuxième jeune homme, Kaguya-hime demanda de lui apporter une branche de l’arbre dont le tronc est fait d’or et les fruits de gemmes. Cet arbre se trouvait sur l’île de Hôrai, une île légendaire où vivent les immortelles et les immortels. Cette fois-ci, le prétendant tenta de duper la jeune femme en faisant fabriquer la branche en or. Il y fit adorner de multiples pierres précieuses avant de l’offrir à la princesse. La jeune femme crut bien devoir le marier, jusqu’à ce que les artisans ayant créé la branche se pointent à sa porte, demandant leur dû pour leur création. Elle sut ainsi que la branche était fausse.

Au troisième jeune homme, la princesse lumineuse demanda de lui ramener la fourrure de Hinezumi, ce rat de feu se trouvant dans les montagnes de feu au sud de la Chine, la cordillère du Kunlun. Le prétendant paya un draconnier une énorme somme pour lui ramener la fourrure du rat du soleil, mais lorsque vint le moment de tester sa résistance mythique aux flammes, la fourrure partit en fumée dès qu’elle toucha le feu. La jeune femme détermina ainsi que ce ne pouvait être la fourrure demandée et le jeune homme repartit, honteux.

Au quatrième jeune homme, la princesse requit le joyau aux cinq couleurs porté par un dragon à son cou. Considérant le courage de ce prétendant, il n’eut pas peur de silloner les mers et de parcourir le monde à la recherche du dragon pour lui enlever son joyau. Or, il se blessa si gravement durant ses voyages qu’il n’osa pas revoir la princesse Kaguya lorsqu’il revint chez lui, bredouille et en piètre état.

Finalement, au cinquième jeune homme , Kaguya-hime demanda un coquillage cauris, aussi appelé porcelaine-monnaie, que l’on trouve parfois dans les nids des hirondelles. Le prétendant chercha donc tous les nids des environs, espérant trouver l’objet tant convoité. Cependant, lorsqu’il crut enfin l’avoir trouvé, il s’étira sur son échelle pour l’atteindre, tomba, puis se blessa gravement. Non seulement il n’oserait plus se montrer devant la princesse avec de telles blessures, mais ne pourrait même pas lui offrir le cauris, puisque celui-ci se révèla être une simple crotte d’oiseau durcie ressemblant à un coquillage.

Débarrassée des cinq prétendants, Kaguya-hime put enfin continuer sa vie avec ses parents adoptifs. Ils continuèrent de couper du bamboo et de vivre simplement.

Néanmoins, un décret impérial inattendu vint déranger leur quiétude. L’empereur avait entendu parler de la beauté légendaire de la jeune femme et désirait la rencontrer. La princesse lumineuse partit donc rencontrer l’empereur dans son palais. Il s’éprit immédiatement de la jeune femme, qui refusa tout de même de lui accorder sa main.

— Je ne suis pas d’ici, je ne peux donc pas vous marier, dit-elle.

L’empereur la laissa partir, mais ne l’oublia pas pour autant.

Les saisons passèrent, la petite famille vivant heureuse dans son village. Un soir d’été, le vieil homme trouva sa fille adoptive en pleurs sous le clair de lune. Lorsqu’il lui demanda la raison de ses larmes, elle ne lui répondit que pas un regard plein de tristesse et un hochement de tête. Cette scène se répéta plusieurs nuits d’affilé, sans que ses parents ne réussissent à la consoler ou à lui tirer les vers du nez.

À la mi-août, la veille de la pleine lune, Kaguya-hime finit pas vider son sac.

— Maman, papa, je viens de la Lune et, après toutes ces années sur Terre, je dois bientôt y retourner. Demain, lorsque la pleine lune atteindra son zénith, on viendra me chercher afin que je rentre chez moi. Je n’ai vécu que du bonheur avec vous et je vous en suis très redevante, termina la princesse Kaguya en tenant ses deux parents larmoyants contre elle. Je n’ai pas le droit de rester ici.

La princesse continua son récit en expliquant les raisons pour lesquelles on l’avait confiée au vieux couple il y a tant d’années. Dû à de l’instabilité céleste, on l’avait cachée sur Terre pour sa sécurité, mais elle devait maintenant retourner à sa terre natale.

Afin de contrer l’arrivage céleste qui viendrait enlever sa fille la nuit prochaine, la vieille dame demanda l’assistance de l’empereur. Celui-ci envoya donc deux mille soldats protéger la résidence de la princesse et de ses parents afin de veiller sur la jeune femme.

Nonobstant, la pleine lune venue, une forte lumière aveugla les soldats et des êtres céleste descendirent du ciel.

Pendant ce temps, le visage inondé de larmes, la princesse Kaguya écrivait une lettre remplie de regrets à l’empereur. Elle demanda à ses parents de lui faire parvenir avec une fiole d’élixir d’immortalité. À ses parents bien-aimés, elle légua sa robe de plumes en guise de souvenir.

Les êtres célestes s’impatientant, elle les laissa ensuite la ramener à la capitale de la Lune, Tsuki-no-Miyako, dans une avalanche de larmes.

Lorsque l’empreur reçut la lettre de Kaguya-hime, il décida d’aller incinérer une lettre de sa main sur la montagne se rapprochant le plus du ciel, soit le Grand Mont de l’ancienne province japonaise de Suruga. Il y brûla également la fiole d’élixir d’immortalité, l’empereur ne désirant point vivre éternellement sans voir la princesse Kaguya.

On dit que le nom de ce mont proviendrait d’une déformation du mot « immortalité » en japonais, le mont Fuji.

La série Contes de fée méconnus englobe des contes, mythes et légendes varié.e.s provenant des quatre coins du monde. Pour en lire davantage, visitez cette page dédiée aux articles de fiction.

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