Le langage des bêtes — Contes de fée méconnus

Dans une contrée lointaine, un seigneur avait un fils doué d’une grande intelligence. Désirant apprivoiser son talent davantage, le père envoya le jeune homme à l’école. Chez son maître, le fils sembla bien se plaire. Après quelques jours, son père lui demanda ce qu’il avait appris.

— J’ai appris le langage des chiens, répondit le fils.

Le père, outré, l’envoya étudier chez un autre maître afin qu’il y apprenne des sujets qu’il considérait plus pratiques. Le jeune y étudia plusieurs semaines avant que son père le questionne à nouveau sur son apprentissage.

— J’ai appris le langage des grenouilles, répondit le jeune homme à son père.

Le seigneur se fâcha. Comment son maître pouvait-il lui enseigner de telles balivernes? Il décida donc d’envoyer son fils faire ses études chez un différent maître.

Le jeune homme continua donc d’étudier chez ce nouveau maître pendant deux mois, puis son père le questionna sur ses études.

— J’ai appris le langage des oiseaux, répondit le jeune homme à son père.

Le père fut prit de rage. Pourquoi son fils tenait tant à apprendre des choses si inutiles et à lui faire honte?

Le seigneur décida donc de se débarrasser de son fils afin d’éviter de salir davantage l’honneur de la famille. Il entra en contact avec un voisin pauvre et lui offrit mille deux cents francs pour assassiner son fils, puis lui ramener son cœur.

Le voisin, d’âme douce et aimable, ne désirait point prendre une vie, mais n’avait guère le choix s’il voulait trouver aliment sous sa dent. Il accepta donc la proposition du seigneur avec grands regrets.

Ainsi, un beau matin, le seigneur envoya son fils ramasser des baies dans les bois avec un voisin. Ne questionnant pas une demande si anodine, le jeune homme partit de bon train avec le pauvre voisin. Dès que les deux hommes furent assez profondément cachés dans les bois que personne ne pourrait les entendre, le voisin s’empressa de tout raconter au jeune homme.

Ce dernier eut le cœur brisé d’apprendre que son propre père le voulait mort, mais remercia son compagnon de son honnêteté. Il tenta de convaincre le voisin de conserver l’argent et de retourner au village pour confronter son père, mais le voisin l’em empêcha, faisant comprendre au jeune homme que son père ne ferait qu’envoyer quelqu’un d’autre pour provoquer sa mort. Il devait plutôt s’enfuir avec l’argent.

Le fils refusa toujours de prendre les sous du pauvre homme, mais accepta de sauver sa propre peau en s’enfuyant. Les deux hommes tentèrent d’attraper un lapin pour en prendre le cœur, mais l’animal était trop rapide. Ils finirent donc pas tuer une jeune biche afin que son organe cardiaque convainque le seigneur que la mort de son fils soit bien réelle. Les deux hommes se dirent adieu et partirent chacun de leur côté.

Le jeune homme marcha dans la direction opposée à sa résidence, le cœur lourd. Il continua son chemin jusqu’au croisement d’une route, sur laquelle il rencontra deux prêtres en route vers Rome. On lui demanda où il allait et il répondit qu’il vagabondait et n’avait ni argent, ni destination précise. Les deux prêtres le prirent donc sous leurs ailes et l’invitèrent à se joindre à eux sur leur chemin. Le jeune homme accepta.

À la tombée de la nuit, les prêtres proposèrent au jeune homme de la présenter au maître d’une maison dans les environs afin de lui obtenir l’hospitalité pour la nuit. Le jeune homme soupa donc, puis on lui assigna une chambre.

Avant d’aller dormir, on lui demanda de bien éteindre la bougie avant d’aller au lit, sous prétexte que le maître de la maisonnée avait peur du feu. Le jeune homme acquiesça et monta à sa chambre. Lorsqu’il remercia le ciel de lui être venu en aide, il entendit des chiens aboyer dans la cour. Il fut si obnibulé à écouter leur conversation qu’il en oublia d’éteindre la chandelle.

Au rez-de-chaussée, le maître remarqua la lumière à l’étage.

— Marianne, va vérifier ce qui se passe à l’étage. Il semblerait que notre invité ait oublié d’éteindre sa chandelle, dit le maître à sa servante.

La jeune femme monta donc demander au voyageur se tout se passait bien parce que la lumière brillait toujours dans sa chambre. Le jeune homme lui répondit qu’il écoutait les chiens discuter et en avait oublié la chandelle. Le maître entendit cela et se dit que le jeune homme était donc fou! Il s’exclaffa.

Cepenant, le voyageur descendit avec Marianne et avisa le maître qu’il était en danger imminent. Il avait écouté la conversation des chiens et appris que des voleurs creusaient un tunnel jusqu’à la cave. Les chiens étaient anxieux pour leur maître puisque leurs chaînes les empêcheraient de le protéger. Le maître, initialement rieur, sembla prendre la situation plus au sérieux en écoutant les détails et fit venir les gendarmes.

Ces derniers s’installèrent dans le sous-sol avec les chiens et attendirent que les voleurs percent le mur. Une fois les quatre cambrioleurs dans la cave, on bloqua furtivement l’entrée du trou afin qu’ils ne s’échappent et les arrêta.

Le maître força le jeune voyageur à accepter une récompense pour l’avoir aidé à prévenir une tragédie. Tout le monde alla se coucher pour la nuit, en prenant soin de bien éteindre les chandelles avant d’aller dormir.

Le lendemain, le jeune reprit la route avec les deux prêtres. Ils s’arrêtèrent seulement lorsque le soleil se couchait pour demander l’hospitabilité chez les gens.

L’un de ces soirs, le groupe s’arrêta dans une maison où vivait un maître avec sa fille et leur servante. On les reçut pour souper, puis leur assigna chacun une chambre pour dormir. N’ayant pas encore sommeil, le jeune homme s’accota près de la fenêtre avec sa chandelle, observant la lisière des bois. Le maître, remarquant la lumière brillant toujours à l’étage, se questionna.

— Gertrude, peux-tu aller voir ce qui se passe, le jeune voyageur semble toujours levé, dit le maître.

La servante se dirigea donc vers l’étage et demanda au jeune homme si tout se passait bien. Il descendit pour s’expliquer.

— J’écoutais la conversation qu’avaient les grenouilles entre elles dans le fossé en lisière de la forêt.

Le maître et sa servante se regardèrent, croyant que le jeune homme devenait fou.

— Elles disaient que votre fille est muette.

— Oui, elle l’est bien, répondit le maître, le doute semé dans son esprit.

— Il semblerait que votre fille ait échappé un morceau d’hostie lors de sa première communion et qu’une des grenouilles l’ait récupéré. Si nous arrivons à le récupérer, votre fille devrait recommencer à parler.

Le maître doutait fortement de l’histoire, mais ne voulait pas prendre le risque de l’ignorer. Au matin, on fit fonc abattre le fossé et de multiples grenouilles en sortirent. On y trouva parmi elles une grenouille beaucoup plus grosse que les autres. On lui demanda de redonner l’hostie, mais rien ne se passa. Le jeune homme dut donc intervenir en s’adressant à la grenouille dans un langage qu’ellle puisse comprendre.

Soudain, la grenouille recracha un morceau d’hostie tout baveux. On le redonna à la jeune fille, qui se mit tout de suite à reparler! Évidemment, le jeune voyageur fut fêté et choyé avant de reprendre la route avec les deux prêtres.

Leur chemin se déroula ensuite sans incident notable jusqu’à Rome. Lorsque les deux prêtres apprirent le pape mort, ils se dirigèrent immédiatement vers le vatican pour aider les autres cardinaux à trouver un successeur.

Pendant ce temps le jeune voyageur écoutait les oiseaux chanter dans la cour. Il fut très surpris d’entendre ce qu’ils avaient à se dire, mais n’en fit pas une scène. À la fin de la session de la journée, le jeune homme rejoint les deux prêtres pour le souper. L’un deux rit que s’il devenait le prochain pape, il ferait du jeune homme son décrotteur. Le deuxième renchérit qu’à son tour, il ferait du jeune homme son courrier.

Les trois hommes irent ensuite dans la cour pour discuter avec les autres cardinaux pour la soirée. On dit que la prédiction divine était qu’un bout de ciel tomberait sur la tête du prochain pape.

Ainsi, un nuage noir sembla passer au-dessus des gens dans la cour avant de s’arrêter sur la tête d’un des prêtres. Tous se turent. Le prêtre se leva au moment où le nuage noir continuait son chemin au-dessus de la tête du deuxième prêtre. Celui-ci se leva à son tour, mais le nuage continua sa lancée avant de s’arrêter au-dessus de la tête du jeune homme, puis de relâcher ses gouttes de pluie sur lui uniquement.

Le jeune homme fut donc élu le nouveau pape.

Pendant ses péripéties, le père du jeune homme avait décidé de noyer sa culpabilité d’avoir fait tuer son fils dans l’alcool. Sa femme lui en voulait amèrement et n’avait plus la patience de le gérer. Elle l’envoya donc voir le curé.

L’homme lui avoua ses péchés et lui demanda comment il pourrait les expier. On lui dit que c’était une question pour un évêque. Il trouva donc un évêque à qui exprimer ses fautes, qui le dirigea vers un archevêque. On le recommanda ensuite à un cardinal, puis au pape.

Lorsque l’homme confessa ses péchés au pape, le juene homme reconnut la voix de son père et lui dit que Dieu le pardonnait.

— Bonjour, père, dit-il ensuite.

La série Contes de fée méconnus englobe des contes, mythes et légendes varié.e.s provenant des quatre coins du monde. Pour en lire davantage, visitez cette page dédiée aux articles de fiction.

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